Comment la maladie fracasse fatalement des vies

Article : Comment la maladie fracasse fatalement des vies
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3 octobre 2017

Comment la maladie fracasse fatalement des vies

Quand j’ai rencontré F. un grand ami de Fac, il y a quelques années, nous étions deux jeunes au début de la trentaine, un peu foufous, avec plein de rêves et d’ambitions. Nous étions chacun en quête de bien être et de bonheur. Nous étions déterminés à réussir. Et moi, je trouvais cette amitié parfaite. J’étais sûr que ce serait pour toujours.

Sauf que F. a, depuis, été diagnostiqué d’une maladie chronique. Par pudeur, je préfère ne pas la nommer. Cette maladie qui, bien qu’elle puisse être soignée, ne guérira plus jamais complètement. Et qui prend une certaine place dans sa vie au quotidien. Il est interné depuis plusieurs années, cloué sur un lit à bagarrer avec cette douleur et à vivre toutes les peines et toutes les souffrances du monde.

Des malades. Crédit photo : pixabay

 

La maladie fait tant souffrir…
La première fois que je suis entré dans la chambre de ce jeune trentenaire, j’ai lu tellement de désespoir dans ses yeux. J’avais peur, peur de sa maladie, peur de le voir ainsi souffrir, peur de la mort qui pouvait l’emporter à tout moment. Chaque fois que je lui rends visite, je sens aussitôt une forte émotion m’envahir. Se retrouver en face de tout ce calvaire qu’il subit, comme beaucoup d’autres malades que j’ai souvent vu là-bas, me fend le cœur. Oui, c’est si lourd et insupportable de voir ainsi des gens qui marchaient pourtant sur leurs deux pieds, se retrouver comme des nouveau-nés, qu’on porte sur le dos, lave et nourrit, au quotidien. Ils ne vivent plus. On les fait vivre. La maladie a tellement fracassé leurs vies. Elle les a brisés.

Pour le cas de F., tout a commencé avec l’annonce de sa maladie. Ce moment où le médecin a fait basculer sa vie. À jamais. Je me souviens de ce jour comme si c’était hier. Mon cher F. s’était pris cette triste nouvelle en pleine gueule. Et depuis, il est misérable et malheureux. A cause de cette maladie, il a traversé des périodes vraiment difficiles. De grandes périodes de doute, de peur. De désespoir, même. Ne pas savoir de quoi demain sera fait est profondément inconfortable pour un malade. Chaque fois que je vois tous ces gens internés et dont le seul vrai repas quotidien est la surdose de médicaments pris, bien sûr, de grandes questions me tourmentes et me traversent l’esprit : Pourquoi cela leur arrive t-il à eux ? Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Qu’ont-ils fait de mal pour autant souffrir sur un lit d’hôpital? Et j’en passe. Je sais, ces questions restent bien évidemment sans réponse.

La maladie fait traverser de dures épreuves…
La maladie de F. lui a déjà fait traverser tellement d’épreuves. Par exemple, le jour où j’ai assisté à l’arrivée du fauteuil roulant que lui avait offert un autre ami, j’ai eu de la chair de poule. Dur dur de croire que F. ne pourrait plus marcher sur ses deux pieds. Ce fut une étape si douloureuse et irréversible vers une nouvelle personne. Lui, si grand et costaud que j’ai connu, mais aujourd’hui devenu si chétif et émacié, qui ne sera plus jamais debout. Ne marchera plus, jamais. Il a tellement et profondément changé. Je sais que pour lui, comme pour beaucoup d’autres, rien ne serait plus comme avant, je le sais au fond de moi. Comme beaucoup d’autres malades, il jongle avec les différents traitements. J’ai la nette impression que les antalgiques et anti-inflammatoires qu’il ingurgite à chaque heure ne lui font plus beaucoup d’effet.

L’apport affectif de sa famille a disparu. Je vois à peine un des siens autour de lui. Il fait tout pour s’accrocher…Mais, sa douleur est énorme et fatale. Chaque jour est pire que celui de la veille. Son quotidien c’est fatigue + amaigrissement + douleur + médocs. Très flippant tout ça.
Comme tous les jeunes intelligents, F. avait des projets intéressants plein la tête, une envie folle de croquer la vie, une solide confiance dans l’avenir, un métier entre les mains, une formation professionnelle bien huilée. Mais à cause de cette pernicieuse maladie, tout s’achevait là et son existence s’arrêterait.

Soudain, l’orage a éclaté, la tempête s’est levée et comme un tsunami, cette maladie a dévasté ses projets construits pour l’avenir. Plus rien en lui n’est reconnaissable, l’être familier s’est transformé en étranger, de moins en moins saisissable, puisque son quotidien, son discours, ses paroles prennent une tournure dissolue. En tant qu’ami, j’ai redoublé de vigilance sans rien y comprendre. Je sentais seulement que tout vacillait, que la vie de mon cher ami devenait un enfer peuplé d’idées folles. Dans un tourbillon incessant se succèdent nouvelles alarmantes, idées délirantes, gestes inconsidérés et, enfin, hospitalisation, diagnostic, mutisme décennal.

Une vie avec les médicaments. Crédit photo : pixabay

 

La maladie est une peine énorme…

 

Les années ont passé et petit à petit, la maladie a occupé une place de plus en plus importante dans sa vie. On n’a pas pu lutter contre l’évolution de sa maladie. C’est un combat perdu d’avance. J’ai d’ailleurs mis un peu de temps avant de le comprendre et de l’accepter. Aujourd’hui, il a accepté le fait que la maladie fait partie de sa vie. De lui. Elle est partie intégrante de son quotidien. Indissociable. Pas un jour ne se passe sans qu’il ne doive vivre avec. Quelle peine !

Cet homme que je vois fracassé par la maladie, que je vois souffrir, mais face auquel je me sens impuissant me rend si triste. F. comme de nombreux autres, est confronté au malheur, à la souffrance. Je ressens ses inquiétudes et ses déprimes comme si c’était les miens. Je le vois se battre chaque jour pour que la maladie ne lui vole pas sa liberté. Sa liberté de vivre, de penser, de s’exprimer. D’être entendu, malgré tout. Je sais que s’il arrête de se battre, il meurt. De ça, je suis intimement convaincu. Voilà pourquoi je suis à son chevet tous les jours. Je ne veux pas laisser la maladie le gagner. Elle ne devrait pas avoir raison de lui. Jamais. La vie est bien trop courte pour se laisser abattre ainsi…

Être en santé est une chance, une vraie grâce…

J’ai compris avec la maladie de F. que ne pas avoir de maladie grave ; ne pas être handicapé et cloué par la maladie sur un lit, ne pas être défiguré…C’est une chance énorme, une vraie grâce. Les gens oublient ça tellement vite. Alors, réjouissons nous de marcher sur nos deux pieds, de nous lever chaque matin, de sourire, de rire. Profitons de chaque instant de notre existence. Sourions à la vie. Prenons-la du bon côté. Car vivre malade est un enfer.
Courage à tous ceux qui souffrent le martyr et bagarrent contre la maladie. Courage à tous ceux qui vivent ces peines au travers d’un proche, d’un ami ou d’une collègue. La chose la plus importante de toute vie, c’est notre santé ! Faisons tout pour la préserver, de grâce !
Fabrice Larry NOUANGA

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Commentaires

Didier Ndengue
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Vraiment triste pour ton ami. Une bible, beaucoup de prière et la foi lui feront beaucoup de bien. Il pourra guérir de cette maladie, qui est un démon qui a pris son corps en otage. Rien n'est impossible aux croyants.

Fabrice NOUANGA
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Vraiment très pathétique. Chaque fois que je lui rend visite, je fond en larmes cher Didier. Je lui transmettrai ce message d'espoir comme à beaucoup d'autres internés comme lui. Dur dur de perdre sa santé. Il faut la préserver absolument.